Introduction de l'ouvrage, Acteurs diplomatiques et ordre international fin XVIIIe siècle - XIXe siècle, textes réunis par Marc Belissa et Gilles Ferragu. Actes du colloque organisé le 7 juin 2006 à l'Université de Paris X Nanterre, Paris, Éditions Kimé, 2007.
En 1773, à propos du partage de la Pologne réalisé l’année précédente par la Russie, la Prusse et l’Autriche, un auteur anonyme (mais très certainement inspiré par le ministère des Affaires étrangères français) écrivait :
"Certaines maximes et lois de convention, fondées sur le droit naturel et l’utilité générale, que depuis deux cents ans on trouve religieusement observées par les Puissances de l’Europe dans leur conduite réciproque, ont donné lieu de regarder cette partie du monde comme une espèce de république, dont les nations, qui la composent, sont les membres" .
Cette « espèce de république » européenne est selon l’auteur en passe de disparaître, menacée par un retour du désordre entre les puissances :
"L’espèce de république, que formaient les Nations européennes, n’est plus qu’un beau fantôme. Une anarchie destructive de tout repos des souverains et du bonheur des peuples y succède ; et le tableau effrayant des temps gothiques, que l’histoire a conservé, se représentera de nouveau sur la surface de cette partie du monde."
Cette nouvelle ère, caractérisée par « l’incertitude des propriétés » et les « défiances mutuelles » ne peut qu’aboutir à rien de moins qu’à « un renversement général de tout ordre dans la société des corps politiques ». Tableau noirci à fin de propagande ou conviction alarmiste ? Ce qui est sûr, c’est que l’on pourrait multiplier les exemples tant ce tableau d’un monde en mutation rapide est partagé par un très grand nombre de commentateurs et publicistes des années 1770-1780.
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