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Bonnet de 
la liberté

Révolution Française

Robespierre monstre ou héros ? Proudhon contre Robespierre   Etudes

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Marion Pouffary, Robespierre monstre ou héros ?, Lille, Septentrion, 2023.

L'ouvrage de Marion Pouffary, tiré de sa thèse de doctorat, étudie les légendes noires et dorées de Robespierre au XIXe siècle. Nous reproduisons ici les pages 174 à 182. L'extrait s'insère dans le chapitre VI traitant des légendes noires de Robespierre élaborées par les anarchistes, et en particulier ici par Proudhon. Marion Pouffary est chercheuse associée au Centre d'histoire du XIXe siècle de Panthéon-Sorbonne/Sorbonne Université

Le combat de Proudhon contre les disciples démocrates-socialistes de Robespierre

Si, comme le suppose Albert Mathiez, l'hostilité manifestée par le mouvement socialiste à l'encontre de Robespierre est en grande partie due à l'influence de Blanqui, cette analyse mérite d'être complétée et nuancée. En effet, dans aucun des écrits qu'il a publiés au cours de sa vie, Blanqui ne fait mention de Robespierre de manière négative et c'est uniquement dans ses notes sur l'Histoire des Girondins, qui n'ont pas été publiées, qu'il critique Robespierre. De plus, le mouvement ouvrier français, qui connaît un essor considérable à partir de 1860, est non seulement influencé par les idées de Blanqui mais aussi par celles de Proudhon. Il s'agit des rares socialistes pré-quarante-huitards dont l'influence se consolide dans un contexte de déclin de la production théorique socialiste en France, alors que les écrits de Marx sont encore peu connus (1). Or, contrairement à Blanqui, Proudhon a légué une importante œuvre écrite, dans laquelle il ne manque pas de proclamer dès les années 1840 (2) son hostilité à Robespierre. Celle-ci éclate au grand jour lors des polémiques qui l'opposent aux démocrates-socialistes (3) sous la Deuxième République, à une période où, selon Edward Castleton, il est sans doute le journaliste socialiste français le plus lu (4). La légende noire anarchiste qui naît dans les écrits de Proudhon reprend l'image du Robespierre bourgeois et clérical de la légende noire communiste mais se distingue de cette dernière en dénonçant l'autoritarisme de Robespierre, et fait alors écho à la critique de la tyrannie de Robespierre véhiculée par la légende noire libérale. En effet, la question de la liberté est au cœur des préoccupations des anarchistes, même si, contrairement aux libéraux qui voient dans le principe d'égalité le principal danger pour la liberté, c'est le principe d'autorité qui, pour les anarchistes, constitue la menace essentielle pour la liberté.

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Quelle fraternité ? Républiques américaine et française dans la culture politique républicaine-démocrate aux Etats-Unis (novembre 1792-mai 1794)   Etudes

Marc Belissa, Université Paris Nanterre

On le sait, l’année 1793 a été un tournant dans la manière dont les Américains ont compris et interprété la Révolution française mais aussi dans la construction du « parti » républicain-démocrate en gestation depuis 1791. Ce dernier processus a une origine « endogène » — à savoir l’opposition d’une partie de l’opinion aux projets économiques et politiques des fédéralistes au pouvoir (1) — mais tous les historiens ont également reconnu que la dynamique de la Révolution française et la lutte partisane autour de son interprétation et des relations franco-américaines ont accéléré l’élargissement de la fracture entre « parti » fédéraliste et « parti » républicain. Quel a été l’impact chez les Républicains américains de la proclamation de la République française, de l’exécution de Louis XVI et de la lutte de la France contre la « coalition des despotes » européens (jusqu’à la reprise de Toulon, connue en Amérique en mars 1794) ?

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Sieyès, lecteur de Condillac et critique de « l’école de Condillac »   Etudes

Par Jacques Guilhaumou, UMR « Triangle », ENS Lyon.

« M. de C(ondillac) relève les erreurs des p(hiloso)phes. Soit, il peut avoir raison. Mais, dégagé de toutes ces erreurs, je ne me mets en conversa(ti)on avec lui que sur ce qu'il prétend établir. » (Sur L’art de penser)

Sieyès participe d’une génération de législateurs philosophes présents sur le devant de la scène politique pendant la Révolution française. Nombre de députés de l’Assemblée Nationale ont une culture philosophique sans être pour autant des philosophes, hormis quelques exceptions comme Condorcet et les Idéologues. Pour autant la forte présence philosophique de Sieyès se manifeste par ses échanges avec de nombreux philosophes qui le considèrent à part égale, qu’il s’agisse de Condorcet, des Idéologues et surtout des philosophes allemands présents à Paris. Pour mesurer la portée d’un tel engagement philosophique de Sieyès, nous disposons d’un ensemble de manuscrits philosophiques de longueurs très inégales, allant de simples notes à de longs développements, mais répartis sur une longue période, c’est-à-dire de ses manuscrits de jeunesse des années 1770 à ses manuscrits les plus tardifs des années 1810. En leur sein, la présence de Condillac selon diverses modalités est quasi constante, comme en témoigne d’emblée le premier manuscrit, le Grand cahier métaphysique présenté par notre soin dans le cadre de la publication de manuscrits de Sieyès en deux volumes (Christine Fauré, 1999, 2007) (1).
Qui plus est, la confrontation entre Sieyès et Condillac prend appui sur le positionnement central de la pensée condillacienne dans l’ordre philosophique des années 1770 aux années 1800 et sur son extension à la formulation du nouvel ordre social. La méthode analytique de Condillac est également mise en œuvre dans ses textes politiques. Mais tel n’est pas aujourd’hui notre propos plutôt centré sur les aspects philosophiques et linguistiques des manuscrits de Sieyès dans leur rapport à Condillac à divers moments de l’itinéraire de Sieyès.

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La Société des Anti-Politiques d'Aix   Etudes

par Jean-Baptiste Budjeia, Université de Lille (UMR 8529-IRHiS)

Les Antipolitiques étaient un club politique au recrutement très populaire, dans une ville « aristocratique ». Aix, capitale de l’ancienne province de Provence, fut près de trois ans capitale du jeune département des Bouches-du-Rhône. Parmi ses trois députés aux états généraux du Royaume, elle avait envoyé son archevêque, Boisgelin, et le tonitruant Mirabeau. Mais cette « façade aristocratique » ne doit pas laisser oublier qu’il existait dans cette ville un mouvement populaire fortement engagé dans le processus révolutionnaire, mouvement porté par des artisans et des cultivateurs qui s’établirent en cercle le 1er novembre 1790 et se choisirent un nom, les Antipolitiques, qui ne peut laisser indifférent. Être Antipolitiques ne signifiait pas être contre la politique, mais contre les hommes politiques, du moins contre les pratiques qui leur étaient associées, ces hommes étant perçus comme des intrigants gouvernant pour leurs intérêts propres contre la Chose publique et le « bonheur commun » ; on opposait, en somme, les intérêts particuliers à la vertu, nous y reviendrons. Des artisans et des cultivateurs qui doubleraient sur sa gauche la Société des Amis de la Constitution d’Aix, tenue par les robins de la ville, et rivaliseraient de prestige et de ferveur patriotique avec les puissants Jacobins marseillais.

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Richesse et vertu chez Harrington   Etudes

Par Alberto Ribeiro G. de Barros, Université de São Paulo/CNPq.

John Pocock fait de James Harrington une figure fondamentale du républicanisme anglais et lui accorde une place centrale dans l’anglicisation de ce qu’il a dénommé le langage de la vertu. Utilisé par les humanistes de la Renaissance italienne et surtout par Machiavel, ce langage a rétabli au début de la modernité l’idée aristotélicienne selon laquelle l’être humain développe sa nature morale et politique lorsqu’il participe avec ses semblables à une action collective dans la construction d’un ordre politique capable de faire face aux forces instables de la contingence (1). D’après Pocock, ce même langage a été repris par Harrington dans son projet constitutionnel d’une république agraire de petits propriétaires fonciers, autonomes, armés et dotés d’esprit civique, prêt à se battre pour leur liberté (2). L’image produite par Pocock est ainsi celle d’un auteur qui a préféré adopter le modèle de la cité ancienne, au sein de laquelle régnait la vertu civique de libres tenanciers armés, en détriment des nations commerçantes modernes dont la multiplication des richesses représenterait un facteur corrupteur qui menacerait la stabilité et la longévité de la république (3).

Mon propos est de problématiser cette image, d’abord, en mettant en valeur quelques passages de l’œuvre d’Harrington (4), dans lesquels la base matérielle du gouvernement n’est pas la propriété foncière, mais les biens monétaires. L’intention est de rappeler que sa théorie sur les fondements socio-économiques du pouvoir est également adaptée aux nations commerçantes. Ensuite, je voudrais souligner qu’il y a chez lui une conception de la vertu liée aux ordonnances et dispositifs constitutionnels qui est capable de maintenir la stabilité et la longévité de la république autant ou plus que la vertu des citoyens, indépendamment du fait que la république soit agraire ou soit commerçante.

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Sieyès était-il rousseauiste ? Réponse critique à Jonathan Israël   Etudes

par Christine Fauré, directrice de recherche émérite au CNRS.

La panthéonisation de Jean-Jacques Rousseau, le 20 vendémiaire l’An III (11 octobre 1794), célèbre l’héritage de l’auteur du "Contrat Social" qui traversa toute la Révolution. C’est un pic de reconnaissance.
Jonathan Israël, dans un ouvrage de près de 1000 pages sur les idées révolutionnaires (1) , cherche dans un premier temps à évaluer ce rousseauisme révolutionnaire décidément trop vague :

« Une grande variété d’acteurs de tous bords adorait Rousseau, de la portraitiste… Élisabeth Vigier le Brun (qui détestait la Révolution) au catholique révolutionnaire Fauchet, jusqu’à Robespierre et Saint-Just… Rousseau était le héros, tant de la droite que de la gauche, il acquit un prestige d’une ampleur sans pareille » (2).

À travers le défilé des grandes voix de la Révolution, Jonathan Israël tente de nuancer cette approche. C’est ainsi que Brissot (p. 81), Marie-Josèphe Chénier (p.84) (3), Nicolas Bergasse, passent sous le radar du Rousseauisme. Mais peut-on étendre ce Rousseauisme tout azimut à l’abbé Sieyès ? Jonathan Israël constate que la rhétorique des débuts de la Révolution trouve son lexique dans les premiers essais de l’abbé Sieyès : Essai sur les privilèges, Qu’est-ce que le Tiers-État ?, Vues sur les moyens d’exécution, Reconnaissance et exposition raisonnée des droits de l’homme… . « Sans être tout à fait Rousseauiste, Sieyès emprunte néanmoins à Jean-Jacques certaines expressions » écrit Jonathan Israël de manière évasive sans se lancer dans une identification précise de ces fameuses formules.

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« The Many and the Few » Économie politique aristocratique versus économie politique républicaine aux Etats-Unis (1790-1793)   Etudes

par Marc Belissa Université Paris Nanterre

Dans mes articles précédents sur le républicanisme aux Etats-Unis dans la décennie 1789-1799, j’avais dans un premier temps étudié le débat sur la nature de la jeune république par le biais du cérémonial lors de la mise en place du gouvernement fédéral en 1789 et 1790, j’ai ensuite présenté la réception de la première partie de Rights of Man aux Etats-Unis en 1790 et 1791 et notamment le débat pour et contre la critique de Paine par John Quincy Adams/Publicola, débat qui posait à nouveau la question de la nature de la république américaine au regard de la « constitution britannique » et de la Révolution française (1). Je poursuis aujourd’hui en m’intéressant à l’émergence d’une économie politique républicaine, selon l’expression de l’historien Drew McCoy (2), en 1792-1793 chez un certain nombre de commentateurs critiques de la politique économique et financière du gouvernement fédéral. Une fois de plus, c’est la question de la nature de la république qui est posée à travers ce que l’on pourrait appeler, dans le langage actuel, des projets de société concurrents.

Dès 1789, des critiques s’élèvent contre la politique économique du Secrétaire d’Etat au Trésor Alexander Hamilton. Ces critiques s’accentuent en 1790 et 1791 jusqu’à provoquer l’apparition de ce que James Madison et Thomas Jefferson commencent à appeler au printemps 1792 le « parti républicain » ou le republican interest. Ces débats se poursuivent en 1792 et au début de 1793 en relation avec l’évolution économique et sociale qui marque ces premières années de la république fédérale.

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La conception de la liberté comme non-domination de Philip Pettit   Etudes

Par Alberto Ribeiro G. de Barros, Université de Sao Paulo

Il s'agit ici d’évaluer si la conception de la liberté comme non-domination, telle qu’elle est formulée par Philip Pettit, correspond au sens que la tradition républicaine a attribué à l’idée de liberté et si elle peut être considérée comme une alternative à l’opposition entre liberté négative et liberté positive. L’hypothèse est qu’elle découle d’une interprétation restreinte et partielle de l’idée républicaine de liberté qui se trouve dans le travail de l’historien Quentin Skinner. Ainsi, elle s’éloignerait des importants courants du républicanisme moderne. Afin de discuter cette hypothèse, je présenterai d’abord la conception de liberté comme non-domination et les principales objections apportées à la formulation de Pettit ; ensuite, j’examinerai l’interprétation de Skinner et ses aspects les plus problématiques ; pour finir, je commenterai certaines conséquences de l’utilisation de cette interprétation pour le projet de Pettit.

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« Fraternité » dans le lexique de la révolution française   Etudes

Fraternité et Révolution française : parent pauvre ou mot dans la bouche de tout le monde ?

Par Cesare Vetter et Elisabetta Gon, Université de Trieste

A la fin du texte, les auteurs proposent les concordances complètes des mots qui font partie de la famille lexicale de « fraternité» chez Hébert, Marat, Saint-Just et Robespierre.

La « fraternité » recouvre-t-elle un rôle de « parent pauvre » dans le lexique de la Révolution, comme l'affirme Mona Ozouf (1) et comme l'a unanimement et longtemps soutenu l'historiographie révolutionnaire ? À la lumière de nouveaux potentiels de recherche provenant de la numérisation des sources et du déploiement des instruments de la linguistique computationnelle, la réponse doit être reconsidérée : en partie oui, en partie non (2). Le nombre d'occurrences est modeste, non seulement par rapport aux deux autres mots de la devise républicaine (« liberté, égalité, fraternité») (3), mais aussi par rapport à la plupart des mots à forte teneur sociopolitique de la période révolutionnaire. Modeste mais non négligeable (4). Les études sur les corpora numérisés de la période révolutionnaire dont les chercheurs disposent, nous disent que « fraternité » n'est pas parmi les « mots qui sont dans la bouche de tout le monde» (5), cependant sa présence est significative tant en termes de fréquence absolue que de fréquence relative dans le discours public de la Révolution. Les évidences lexicométriques dont nous disposons en ce moment sont provisoires et pourraient changer suite à l'acquisition de nouveaux corpora numérisés. Elles semblent toutefois indiquer plutôt qu’un parent pauvre, un parent modeste, mais digne.

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Le mot «jacobin(s)» dans le lexique de Robespierre   Etudes

Avant propos de Jacques Guilhaumou (ENS Lyon), suivi de la présentation des concordances et collocations de la lexie jacobin(s) chez Robespierre, par Cesare Vetter et Elisabetta Gon (Université de Trieste).

Le mot «jacobin(s)» dans le lexique de Robespierre : évidences lexicologiques et lexicométriques

Par Jacques Guilhaumou, Directeur de recherche honoraire au CNRS en Sciences du Langage, UMR « Triangle », ENS LSH Lyon.

La dénomination de « Jacobins » renvoie au fait que les Dominicains sont appelés en France « Jacobins ». Le Club breton, en s’installant à Paris dans l’un de leurs couvents à la fin de 1789, le couvent des Jacobins de la rue Saint-Honoré, s'autodésigne d’emblée « Société des amis de la constitution, séante aux Jacobins ». De fait, Robespierre utilise très souvent le nom de « Jacobins » pour désigner la « Société des Amis de la Constitution séante aux Jacobins », puis la « Société des amis de la liberté et de l’égalité séante aux Jacobins » (en résumé La Société des Jacobins), et de ce fait les Jacobins réunis en son sein. Le tableau des collocations de « Jacobins » (voir ci-après) avec 353 emplois présente en première ligne la série de mots avec leurs fréquences : La (65) – la (31) – Société (31) – club (10) des (121) Jacobins / Les (143) Jacobins, associés aux spécificités, la Tribune (13) des Jacobins, le club (10), la séance (13) des Jacobins. Il s’agit là d’un premier indicateur d’usages, de nature lexicométrique. Certes l’indexation des collocations renvoie à une diversité textuelle, d’une part les discours et les écrits de Robespierre, et d’autre part les comptes-rendus dans les journaux de ses interventions à la Société des Jacobins et la Convention.

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La vertu dans le lexique de Robespierre : évidences lexicologiques et lexicométriques   Etudes

Par Cesare Vetter et Elisabetta Gon, Université de Trieste

Chez Robespierre, dimension morale et dimension politique sont étroitement liées. Au cours de l'été 1791 Robespierre affirme ainsi que la « politique (…) des fondateurs de la liberté » ne peut « être que la morale même » (1). Dans son discours Sur les principes de morale politique (5 février 1794) il souligne que « dans le système de la Révolution française, ce qui est immoral est impolitique, ce qui est corrupteur est contre-révolutionnaire » (2). La contre-révolution, avant d'être une « contre révolution politique » est une « contre-révolution morale » (3). Le point de convergence de ce puissant entrelacement entre morale et politique est la vertu. La tâche du législateur est de «conduire les hommes au bonheur, par la vertu, et à la vertu, par une législation fondée sur les principes immuables de la morale universelle, et faite pour rétablir la nature humaine, dans tous ses droits et dans toute sa dignité première » (4). La vertu permet aux hommes d’ « attacher leur bonheur individuel au bonheur public » (5).
La notion de vertu a toujours été au centre de la réflexion historiographique sur la pensée de Robespierre. Nous nous limiterons ici à quelques considérations d'ordre général et à proposer en avant-première à la communauté scientifique les concordances complètes de la lexie « vertu(s) » dans les onze volumes des Œuvres de Robespierre, que nous avons composées pour le deuxième tome du Dictionnaire Robespierre (voir la présentation du premier volume), en cours d'élaboration avancée (6).

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La réception de la première partie de Rights of Man aux États-Unis en 1791 (2)   Etudes

Un défi aux "hérésies politiques" : la réception de la première partie de Rights of Man aux États-Unis en 1791 - Deuxième Partie (Voir la vidéo du séminaire au cours duquel ce texte a été présenté, lire la première partie)

Par Marc Belissa Université Paris Nanterre

Encore plus d’hérésies : Publicola contre Paine

La contre-offensive fédéraliste contre Paine débuta le 18 mai par la publication d’un article sans doute dû à la plume de John Quincy Adams dans la Gazette de Fenno (48). Anticipant les Letters of Publicola, l’article commençait par une défense ironique de "l’esprit d’hérésie" faisant évidemment référence à la note de Jefferson. Surtout, il posait la question de la constitution anglaise et de sa critique par Paine. Plutôt que de s’attaquer directement à la Révolution française comme l’avait fait Burke, l’auteur entreprenait de défendre l’idée qu’il existait bien une constitution anglaise qui, bien que non écrite, était parfaitement légitime, contrairement à ce qu’avait écrit Paine. Selon l’auteur de l’article, les constitutions ne sont pas des "bits of parchment" changeables à volonté par les peuples mais des principes écrits dans les cœurs des Anglais : "The people of England have high ideas of personal, social and political freedom — and these ideas are inseparably connnected with certain great principles, which they wisely suppose form the great outlines of a constitution". Cette constitution anglaise, comme la common law dont elle est l’expression, est fondée sur la raison et est inscrite dans la conscience de chaque "free-born Englishman".

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La réception de la première partie de Rights of Man aux États-Unis en 1791 (1)   Etudes

Un défi aux "hérésies politiques" : la réception de la première partie de Rights of Man aux États-Unis en 1791 - première partie (Voir la vidéo du séminaire au cours duquel ce texte a été présenté)

Par Marc Belissa, Université Paris Nanterre

En avril 1791, John Beckley, secrétaire de la Chambre des représentants et ami politique de Thomas Jefferson et James Madison, transmet à ce dernier un exemplaire de la première partie de Rights of Man (1), publiés deux mois plus tôt à Londres (2). Madison — à ce moment un des principaux leaders de la Chambre qui s’est opposé aux projets du secrétaire d’État au Trésor, Alexander Hamilton — fait parvenir le pamphlet à Jefferson, alors Secrétaire d’État c’est-à-dire ministre des Affaires étrangères, pour qu’il puisse contacter des imprimeurs afin d’éditer l’ouvrage aux États-Unis. Jefferson écrit alors à un certain Jonathan Bayard Smith, père de Samuel Harrison Smith un imprimeur de Philadelphie, et accompagne le pamphlet de Thomas Paine d’un court billet déclarant sa satisfaction "that something was at length to be publicly said against the political heresies which had late sprung up among us" (3). Sans que Jefferson en ait été avisé, l’imprimeur publie le pamphlet qui sort le 3 mai 1791, accompagné du billet du Secrétaire d’État, fort embarrassé de cette "fuite" qui le met en porte-à-faux à l’intérieur du gouvernement de Washington.

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République monarchique ou démocratique ?   Etudes

La querelle des titres et la construction d’un cérémonial républicain aux États-Unis en 1789-1791

par Marc Belissa, CHISCO, Université Paris Nanterre

(Voir la vidéo)

En avril 1789, le Premier Congrès de la jeune République fédérale américaine se réunissait à New York. Alors que le processus de ratification de la nouvelle constitution par les treize états n’était pas encore totalement achevé (la Caroline du Nord et le Rhode Island ne la ratifient qu’en mai 1790), il revenait au Premier Congrès de mettre en place les nouvelles institutions dont l’élaboration n’avait pas été réalisée sans obstacles. Dans le débat qui avait suivi la Convention de Philadelphie de 1787 dans laquelle le projet de constitution fédérale avait été rédigé (1), les oppositions avaient été nombreuses tant sur la nature même du gouvernement fédéral que sur ses composantes (2). Celle qui apparaissait peut-être la plus dangereuse aux opposants antifédéralistes et même à certains des partisans du gouvernement fédéral était la fonction présidentielle. Quand on avait proposé à Philadelphie le principe d’un exécutif personnel, un grand silence s’était fait, tant l’idée d’un Président chef de l’exécutif faisait penser à une monarchie déguisée. Les débats autour de la nature du pouvoir présidentiel et surtout sur ses limites nécessaires avaient été particulièrement vifs. Dans les journaux antifédéralistes, l’accusation de monarchisme était partout même si la peur d’une monarchie à l’anglaise était tempérée par la certitude que George Washington — dont tout le monde savait qu’il serait élu Président — n’aspirait pas à devenir roi (3).

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Clore le gouffre de la Terreur   Etudes

Par Françoise Brunel, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

« Clore le gouffre de la Terreur » (1), est la version française originale de la communication présentée à la Conférence internationale sur la Terreur dans la Révolution française organisée, à Stanford University les 10-13 décembre 1992, par Keith Michael Baker, Steven Lawrence Kaplan et Colin Lucas. Le texte a été publié en anglais sous le titre « Bridging the Gulf of the Terror » dans The French Revolution and the Creation of Moderne Political Culture, volume 4, The Terror, sous la direction de Keith Michael Baker, Oxford, Pergamon Press Elsevier Science, 1994. Comme certaines réflexions et pistes de recherche ont trouvé un écho dans de récents travaux, nous n’avons pas jugé inutile de le publier en français, la publication en langue anglaise étant demeurée confidentielle dans les bibliothèques françaises. S’agissant d’une version originale, nous n’avons modifié ni le texte ni les notes, hormis de rares précisions historiographiques indispensables aujourd’hui et indiquées en caractères gras.(FB)

Que l’an III pouvait être « une mine d’or pour l’étude de l’an II », Richard Cobb l’a écrit et démontré par ses travaux (2). En d’autres termes, parler de mettre fin à la Terreur, c’est encore parler de la Terreur. Quel est le statut juridique de la Terreur ? Quel est surtout son lien avec le Gouvernement révolutionnaire ? Quel est, enfin, le régime qui, de thermidor an II à brumaire an IV, durant quinze mois, gouverne la France ? Et, dès lors, quelle peut être l’interprétation du 9 thermidor et celle du « moment thermidorien » dans la « synthèse républicaine » (3). Interrogeons ces mois intenses qui, de la chute de Robespierre à la mise en œuvre d’une nouvelle constitution, voient la fin, non de la Montagne, mais de la Terreur, non le démantèlement, mais l’investissement du Gouvernement révolutionnaire pour une création politique originale, un Gouvernement révolutionnaire sans Terreur – mais non sans une certaine contrainte – sous la conduite d’une coalition de Montagnards, de députés de la Plaine et bientôt de Girondins, réintégrés de frimaire à ventôse an III.

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