par Christine Fauré, directrice de recherche émérite au CNRS.

La panthéonisation de Jean-Jacques Rousseau, le 20 vendémiaire l’An III (11 octobre 1794), célèbre l’héritage de l’auteur du "Contrat Social" qui traversa toute la Révolution. C’est un pic de reconnaissance.
Jonathan Israël, dans un ouvrage de près de 1000 pages sur les idées révolutionnaires (1) , cherche dans un premier temps à évaluer ce rousseauisme révolutionnaire décidément trop vague :

« Une grande variété d’acteurs de tous bords adorait Rousseau, de la portraitiste… Élisabeth Vigier le Brun (qui détestait la Révolution) au catholique révolutionnaire Fauchet, jusqu’à Robespierre et Saint-Just… Rousseau était le héros, tant de la droite que de la gauche, il acquit un prestige d’une ampleur sans pareille » (2).

À travers le défilé des grandes voix de la Révolution, Jonathan Israël tente de nuancer cette approche. C’est ainsi que Brissot (p. 81), Marie-Josèphe Chénier (p.84) (3), Nicolas Bergasse, passent sous le radar du Rousseauisme. Mais peut-on étendre ce Rousseauisme tout azimut à l’abbé Sieyès ? Jonathan Israël constate que la rhétorique des débuts de la Révolution trouve son lexique dans les premiers essais de l’abbé Sieyès : Essai sur les privilèges, Qu’est-ce que le Tiers-État ?, Vues sur les moyens d’exécution, Reconnaissance et exposition raisonnée des droits de l’homme… . « Sans être tout à fait Rousseauiste, Sieyès emprunte néanmoins à Jean-Jacques certaines expressions » écrit Jonathan Israël de manière évasive sans se lancer dans une identification précise de ces fameuses formules.

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