Par Carine Lounissi, Université de Rouen - LARCA Université Paris-Diderot

héritages des républicanismes et république comme utopie

Ce texte a été présenté lors de l'atelier Les héritages des républicanismes et la république comme utopie qui s'est tenu le 27 novembre 2010.

Thomas Paine est souvent décrit comme un auteur – car il n’est pas toujours considéré comme un penseur à part entière – échappant aux catégorisations habituelles. Il n’est pas un père fondateur stricto sensu, car il n’a pas participé à la rédaction de la Constitution de 1787. Bien qu’il envisage très tôt l’Union des Etats américains issus des anciennes colonies britanniques, il n’est pas un « fédéraliste » au sens où ce terme désigne une allégeance politique opposé au camp des jeffersoniens, auquel Paine se rattache. Il n’est pas non plus véritablement un « radical » au sens anglais du terme, le « radicalisme » s’appliquant à un groupe de penseurs souhaitant avant tout démocratiser la monarchie britannique en réformant notamment le système électoral de la Grande-Bretagne, mais n’appelant pas à un renversement de la monarchie pour la plupart d’entre eux. Dans le cadre politique français, Paine n’a été ni un « girondin », bien qu’ayant fréquenté des figures considérées comme « girondines » telles que Condorcet ou Brissot, ni un thermidorien, car il a critiqué la Constitution de l’an III avant de s’y rallier par la suite. Comme le suggère le titre de cette présentation, Paine n’est pas non plus un « républicain » au sens pocockien du terme. Il redéfinit une forme de républicanisme autre fondée sur une conception libérale de l’Etat et c’est ce que je souhaite montrer ici. La pensée politique de Paine est en effet un anti-monarchisme qui rejette toute forme héréditaire de gouvernement. Le contrat politique qu’il propose comme fondement de l'Etat est à la fois libéral et républicain (I), ce qui conduit Paine à refonder le républicanisme tel qu’il existait au XVIIIe siècle (II), et ce qui nous amène à repenser les catégories de « républicanisme » et de « libéralisme » qui ne doivent pas se concevoir uniquement indépendamment l’une de l’autre (III).

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