Condorcet, l'instruction publique et la cité En ligne
jeudi 8 mars 2007par Catherine Kintzler, Université de Lille III
Dans cette étude, il est question de la fonction philosophique du concept d'instruction publique au plus près de l'expérience de la Révolution française, et tout particulièrement de l'oeuvre de Condorcet. On doit en effet à Condorcet, dans le sillage de ses travaux de « mathématique sociale », les argumentations les plus décisives contre la peine de mort, contre l’esclavage et la traite des Noirs, contre l’exclusion des femmes du droit de vote, ainsi qu’une théorie générale du suffrage et de ses paradoxes. Mais on lui doit aussi la théorie la plus complète de l’école républicaine. Pour la première fois, l’idée philosophique de l’institution scolaire est pensée dans sa relation avec la souveraineté populaire.
L’originalité de cette théorie est de montrer que la construction du corps politique républicain ne peut pas faire l'économie de la question du savoir dans sa relation singulière à chaque citoyen. Le concept d'instruction publique a pour fonction philosophique d'assurer l'articulation entre la souveraineté populaire et la légitimité des décisions qu’elle prend et qui l’obligent sans recours : comment un peuple peut-il se garantir contre ses propres erreurs ? Protéger les savoirs contre les pouvoirs, considérer l’excellence comme la forme la plus haute de l’égalité, voir en chaque enfant un sujet rationnel, soustraire l’instruction publique aux volontés particulières et à l’utilité immédiate, telles sont quelques-unes des thèses majeures avancées par Condorcet dans les Cinq Mémoires sur l’instruction publique (1791) et dans le Rapport et projet de décret sur l’organisation générale de l’instruction publique (1792).
N.B. Nous reviendrons sur cette importante contribution d'une philosophe au débat sur l'apport des analyses et propositions de Condorcet en matière d'instruction publique, et bien sûr au-delà (note de la rédaction).