A la lettre « intermédiaire » de Robespierre du 24 mai s’ajoute alors une lettre plus tardive, du 27 juillet, en réponse au courrier de la Municipalité dont nous venons de donner un extrait.

Au regard d'une telle proximité, la place Robespierre, qui a fait l'objet d'un intéressant débat au Conseil Municipal le 31 mai 1999 , n'est donc pas usurpée.

1- A la Municipalité de Marseille, Paris, le 24 mai 1791 :

« Messieurs, Quand Marseille m’avait choisi pour son défenseur, quand je mettais ce titre au-dessus de tous les titres, pouvais-je prévoir qu’à mon insu, au moment où une indisposition causée par l’excès des travaux dont on nous accable me forçait depuis quelques jours à m’absenter de l’Assemblée, l’intéressante cause de Marseille, du département des Bouches-du-Rhône et de tous les patriotes français, serait présentée et jugée au même instant ! C’est cependant ce qui vient d’arriver….Magistrat vertueux d’un peuple digne de la liberté, une seule pensée me console et doit vous consoler aussi ; votre patriotisme, votre courage, votre vertu sont au-dessus de toutes les calomnies, au-dessus de tous les événements. Vous et moi, nous continuerons à veiller pour la liberté, pour la patrie, à les défendre de tout notre pouvoir dans ce temps de crise où leurs ennemis réunissent contre elles tous leurs efforts. Conservez-moi votre estime, votre amitié, votre confiance, enfin l’honneur de défendre la cause de la patrie en défendant la vôtre. Robespierre »

2-A Monsieur le Maire de Marseille, sans date, reçu à Marseille le 27 juillet 1791 :

« Je regrette amèrement de n’avoir pu vous exprimer plus tôt tous les sentiments d’estime, d’attachement et de reconnaissance que m’ont inspiré les lettres que vous m’avez fait l’honneur de m’écrire. Ne doutez pas que je sois dévoué jusqu’à la mort à la cause de Marseille et à celle de la Constitution, à laquelle elle est liée. Au milieu des factions qui menacent la liberté, au sein des persécutions qu’éprouvent quelque fois ses défenseurs, il est doux de penser qu’il est des lieux, où la vertu et les lumières des bons citoyens lui assurent un triomphe immortel sur ses perfides ennemis. Je voudrai qu’il me fût permis de remettre actuellement sous vos yeux le tableau de la situation des affaires publiques, mais je dois vous prévenir qu’il existe aujourd’hui un système d’intrigues, de calomnies, dont le but est de tromper l’opinion publique par les récits les plus infidèles et quelque fois les plus imposants sur les événements les plus décisifs pour le succès de la révolution, et sur la nature des dangers et des ennemis qui la menacent. Beaucoup de citoyens paraissent croire que l’exactitude de la poste n’est pas toujours scrupuleuse, lorsqu’il est question de la correspondance des corps ou des individus connus par leur patriotisme. Je suis avec un attachement fraternel. Robespierre. »

La Municipalité de Marseille lui répond le 1er août, en précisant que « nous avons lu votre lettre avec ce sentiment que vous savez si bien inspiré à tous les hommes qui se font gloire d’être dévoués aux vrais intérêts de la patrie ». Et elle ajoute : « Il est sans doute impossible de rien ajouter au patriotisme qui vous anime et au courage que vous avez montré dans les circonstances les plus difficiles, mais la patrie vous demande encore une chose, c’est de démasquer les traîtres qui peuvent vous être connus, et qui, couverts du voile de la liberté qu’ils affectent de protéger, sont les seuls à craindre pour la constitution de la France ». Robespierre répond par retour de courrier.

3-A la Municipalité de Marseille, Paris, le 10 août 1791 :

« J’ai reconnu dans votre dernière lettre tout le patriotisme généreux, l’attachement inaltérable aux principes de la Constitution et à la liberté qui vous a mérité la reconnaissance de tous les Français, et qui vous assure pour jamais les sentiments profonds d’estime et de fraternité que je vous ai voüé. Je ne connais aucune manière de les exprimer qui soit digne de vous que l’hommage d’un écrit que je consacre à la patrie et à la liberté, que je recommande à tous les amis de l’une et de l’autre. Robespierre »

N.B. Ces trois lettres, disponibles aux Archives Municipales de Marseille (4D 43, f°87, 116 et 122), ont été d'abord publiées par Alfred Chabaud dans les Annales Révolutionnaires, 15, 1923. Puis elles ont été republiées dans Robespierre, Œuvres, Paris, 1926, t. 3, 1, Lettre de la Municipalité de Marseille à Robespierre, 18 avril 1791, p. 103; Robespierre à Marseille 24 mai, p. 105 ; M. 27 mai, p. 106 ; R. 27 juillet p. 117 ; M. 1er août p. 119 ; R. 10 août, p. 120 ; M. 17 août p. 120. Correspondance publiée par Georges Michon. Merci à Marianne de nous l'avoir rappeler. Nous avons vérifié les transcriptions d'après les manuscrits originaux.