Des Etats généraux du mouvement social au niveau suisse Actuel
lundi 23 janvier 2006Archipel, le Journal du Forum Civique Européen N°130 de septembre 2005, rend compte, dans la rubrique intitulée "Suisse", d’une initiative de la coordination asile Vaud par un un article sur Pour des Etats généraux sur l’immigration et l’asile rédigé par Bruno Clément. A cet article est joint un encadré ayant pour titre Importance des Etats généraux pour la Révolution française qui établit un parallèle avec 1789.
En effet, face au double obstacle du « cantonalisme » et de la diversité linguistique, le mouvement social en Suisse cherche tout particulièrement sa cohérence dans la manière dont ses acteurs thématisent les particularités et les similitudes de l’immigration et de l’asile dans la relation entre les droits des migrants et les droits sociaux de tous. Le programme d’Etats généraux au niveau Suisse, en référence au surgissement historique du Tiers-Etat, donc du peuple comme acteur (voir encadré ci-dessous), cherche à susciter une articulation entre les expériences vécues de luttes et de résistances sociales, l’analyse de situation politico-institutionnelle et la création collective en direction d’une stratégie commune et de pistes d’action.
Nous remercions Béatrice Mésini, chercheure au CNRS, de nous avoir communiqué ce document.
Encadré: Importance des Etats Généraux pour la Révolution française
« La convocation des Etats généraux en France en 1789 a une très grande importance dans le processus révolutionnaire. C’est le moment où « le peuple » surgit dans l’Histoire, ou le Tiers-Etat (par rapport aux deux autres ordres, la Noblesse et le Clergé) prend la place que sa supériorité numérique et la revendication d’égalité lui permettent de revendiquer. Bien que convoqués par le roi, les Etats généraux conduisent à la fin de l’absolutisme, à la création de l’Assemblée nationale, puis constituante, à l’abolition des privilèges et à la déclaration des Droits de l’homme et du citoyen. Les cahiers de doléances, récoltés tout au long de l’année 1788 et au début de 1789, montrent bien la soif d’égalité qui souffle sur la France, même si peu sont ceux qui demandent le renversement de la monarchie et l’établissement de la démocratie. La pression populaire a également joué un grand rôle dans tout ce processus, les constituants pouvant s’appuyer sur un vrai mouvement citoyen pour faire reculer le roi et lui faire reconnaître l’Assemblée constituante. L’apparition de ce Tiers-Etat sur la scène politique française inspirera plus tard la métaphore de l’apparition d’un autre acteur révolutionnaire : le Tiers monde au moment des décolonisations.
Plus modeste évidemment, l’idée d’Etats généraux de la migration vise également à faire le point de la situation, à discuter entre nous (comme les doléances et l’assemblée constituante à l’époque) et à s’appuyer sur un mouvement citoyen en progression pour revendiquer que le droit d’avoir des droits ne soit pas cantonné aux seuls nationaux. La Révolution française s’est arrêtée en chemin. Il faut que les idéaux de justice et d’égalité ne soient pas dévolus aux seuls bourgeois, mais à tout le peuple, national ou migrant. Les migrantEs sont ces nouveaux acteurs et actrices de la vie politique et sociale suisse qui ne veulent plus retourner dans l’ombre ou dans les ghettos sociaux, politiques et économiques. Que ces Etats généraux de la migration fassent vaciller sur leurs trônes les monarques du Conseil fédéral et leurs vassaux de l’administration fédérale et cantonale. Que finisse l’absolutisme et l’arbitraire, que les mouvements sociaux, artistiques et syndicaux rejoignent ce nouveau Tiers-Etat que sont les migrantEs. Le mouvement est en marche, le processus est lancé. »
Le 27 juillet 2005
Yves Sancey
« En 4 ans, on prend racine ».