L'émeute populaire du 5 septembre 1791 à Nantes Etudes
Par Samuel Guicheteau, Cerhio-Université Rennes 2
Cette étude est développée dans l'ouvrage de Samuel Guicheteau : La Révolution des ouvriers nantais. Mutation économique, identité sociale et dynamique révolutionnaire (1740-1815), Rennes, PUR, 2008, ouvrage tiré d'une thèse soutenue à Rennes 2. L'auteur nous propose ici un extrait centré sur l'analyse d'un événement particulier : l'émeute du 5 septembre 1791 à Nantes. Il s'emploie à mettre en valeur les formes de la participation spécifiquement ouvrière à une émeute populaire dans le cadre révolutionnaire.
Connue comme une grande place négociante et portuaire (1) , Nantes est aussi dans la seconde moitié du XVIIIe siècle une grande ville industrielle et ouvrière. Dans les ateliers et les manufactures, sur les quais et les chantiers, de très nombreux ouvriers (2) et ouvrières y travaillent. En cette période, la ville croît (3) et la Révolution industrielle naît. Si la création des grandes manufactures cotonnières – les indienneries, puis les filatures mécanisées – témoigne avec éclat de ce puissant essor, le travail dispersé connaît lui aussi d’importants changements. Certes, le monde ouvrier nantais présente, à première vue, une grande diversité. Mais la plupart des ouvriers partagent une identité commune forgée au travail : celle-ci se fonde sur la qualification et l’autonomie qui nourrissent un idéal de fierté et de dignité (4). Remis en cause par l’industrialisation, cet idéal s’affirme cependant dans la résistance que les ouvriers opposent aux nouvelles exigences patronales et au renforcement de la police du travail.