Bonnet de 
la liberté

Révolution Française

Terreur, « Terreur », terreur etc. De quoi parle t-on ?   Recensions

Par Yannick Bosc, GRHis, Université de Rouen-Normandie

A propos de l’ouvrage de Michel Biard et Marisa Linton, Terror: The French Revolution and Its Demons, Cambridge, Polity Press, 2021, préface de Timothy Tackett, 241 p.

Dans cette traduction en anglais, raccourcie et remaniée d’un livre paru en français (1), Michel Biard et Marisa Linton proposent une mise au point sur la « Terreur » (grand T), un chrononyme qui est aussi une catégorie politique et l’une des catégories historiographiques les plus polémiques car elle ordonne les interprétations de la Révolution française et avec elle de la « modernité ». Au-delà, ils mobilisent l’histoire des émotions pour interroger l’articulation de la « terreur » (petit t) et de la « Terreur ». Nous verrons que la circulation entre les différentes acceptions et usages de la Terreur/terreur que proposent les auteurs est problématique. Les huit chapitres thématiques, la chronologie de la Convention et les cartes en annexe, composent un ensemble accessible aux non-spécialistes qui trouveront une synthèse des connaissances.
Les auteurs prennent d’emblée leurs distances avec les thèses classiques qui ont longtemps été dominantes. Ils tempèrent celle dite des «  circonstances » qui à leur avis minore le rôle joué par les émotions (l’impact de la guerre civile et étrangère est loin de tout expliquer) et rejettent l’interprétation selon laquelle la terreur (petit "t") serait inhérente à la Révolution française et la matrice des totalitarismes du XXe siècle : « Robespierre n’était pas Staline » (p.3). Dans un contexte d’« exception politique », il s’agit de « saisir ce que signifie vraiment la terreur pour la génération révolutionnaire » (p. 5), d’en restituer la complexité et pour cela de ne pas la réduire à la violence comme c’est ordinairement le cas. Ils rappellent que les révolutionnaires ont eux-mêmes contribué à fixer les clichés en déployant une rhétorique et une imagerie spectaculaires en direction des ennemis de la république, notamment celle de la guillotine qui résume souvent la période (et qui illustre la couverture de l’ouvrage, le sang n’étant pas oublié).

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Une nouvelle histoire de l'humanité   Recensions

Par Aurélien Larné, à propos du livre de David GRAEBER et David WENGROW, Au commencement était... : Une nouvelle histoire de l'humanité, Les Liens Qui Libèrent, 2021.

David Graeber, disparu le 2 décembre 2020, était un anthropologue étasunien, membre de la London School of Economics. Ses travaux touchent à des sujets divers et originaux. Il se fait connaître du grand public en développant le concept de bullshit job, somme de métiers inutiles mais surpayés, produits par le système politico-économique ultralibéral, qu’il oppose aux infirmiers, musiciens, jardiniers ou enseignants ne bénéficiant que d’une très modeste estime sociale. Dans son ouvrage sur Les pirates des Lumières ou La véritable histoire de Libertalia, il expose comment la démocratie pirate donna lieu à l’expérience de la confédération betsimisaraka, entre 1712 et 1803, à Madagascar. Sa somme, Dette : 5 000 ans d’histoire, décrit, de l’Antiquité à nos jours, comment la dette fonctionne comme instrument d’oppression et de contrôle (1). David Wengrow est archéologue et professeur à l’Institut d’archéologie de l’University College de Londres. Ils sont les deux auteurs d’un livre intitulé Au commencement était... : Une nouvelle histoire de l'humanité qui a pour sujet l’origine des inégalités. Il s’agit d’un livre riche et stimulant dont le contenu ne peut être exposé en quelques lignes. Il est néanmoins possible d’en extraire les idées principales et de les discuter.

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La Fin de l'Etat par Jacques de Cock   Recensions

Contrairement à ses ouvrages publiés à la suite de l’aventure des "Œuvres complètes" de Marat avec Charlotte Goetz, le dernier livre de Jacques de Cock, "La Fin de l’Etat", n’est pas consacré à la Révolution française. Il s’agit d’un court essai historique et philosophique sur la manière dont l’Etat moderne s’est construit dans un premier temps, à partir du XVIe siècle, contre les communautés historiques humaines, puis, dans un second temps, a envahi l’ensemble des aspects de la vie sociale jusqu’en 1914 et a, selon Jacques De Cock, pris la place de la société depuis lors.

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Les mouvements sociaux à l'ère des révolutions atlantiques   Recensions

Par Marc Belissa, Université Paris-Nanterre, à propos du livre de Micah Alpaugh, Friends of Freedom. The Rise of Social Movements in the Age of Atlantic Revolutions, Cambridge University Press, 2021, 502 p.

Le dernier ouvrage de Micah Alpaugh entend présenter les relations et les interactions entre les « social mouvements » dans l’aire atlantique pendant ce qu’il est convenu d’appeler l’ère des Révolutions. Micah Alpaugh laisse volontairement de côté les révolutions patriotiques hollandaise, belge, liégeoise, genevoise, polonaise des années 1787-1791 pour rester dans le cadre « atlantique », de même il arrête son étude avant la vague révolutionnaire des années 1810-1820 en Amérique latine.
Les chapitres se suivent selon une logique chronologique et géographique. Dans la première partie, le point de départ est le mouvement contre le Stamp Act en 1765-1766 dans les colonies d’Amérique du Nord, puis celui contre les Townshend Acts jusqu’à la Révolution américaine. Micah Alpaugh passe ensuite dans les Iles britanniques avec le mouvement wilkite et celui pour la réforme parlementaire mais aussi en Irlande avec le mouvement des Volunteers aboutissant à l’autonomie législative du Parlement de Dublin. Il poursuit son étude par le mouvement pour la liberté religieuse et pour les droits des Dissenters et celui pour l’abolition de la traite en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis. Dans la deuxième partie, l’auteur aborde la constitution du réseau jacobin dans la Révolution française et celle des sociétés de gens de couleur à Saint-Domingue, puis l’impact de la Révolution française sur le mouvement radical dans les Iles britanniques avant de revenir aux Etats-Unis avec l’émergence et la victoire du parti républicain démocrate aux Etats-Unis.

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Comment peut-on être robespierriste ?   Recensions

Par Olivier Tonneau, Université de Cambridge

Le livre de Marcel Gauchet "Robespierre, l'homme qui nous divise le plus" récemment paru a suscité cette réponse d'Olivier Tonneau, enseignant chercheur à Cambridge et auteur de "Maudite Révolution" dont nous avons rendu compte sur notre site. La version originale de cet article est parue sur le site En attendant Nadeau Nous publions ici une version de cet article avec les notes de bas de page.

« Le moment est venu », déclare solennellement Marcel Gauchet, de nous accorder sur « l’homme qui nous divise le plus » parce qu’il incarne, pour les uns, l’idéal démocratique dans toute sa pureté, pour les autres, l’idéologie totalitaire. Puisque l’auteur entend dépasser « la querelle des robespierristes et des antirobespierristes » (1), on pouvait espérer que son essai en renouvelle les termes. Il n’en est pourtant rien. On trouve dès l’introduction les affirmations fondamentales de la thèse antirobespierriste classique (2) : l’ouvrage montrera comment « l’ambition de donner toute leur extension aux droits de l’homme allait pouvoir basculer vers un système inédit d’oppression » (3), basculement qui coïncide avec la transformation de l’ « incorruptible » Robespierre en « tyran » (4).

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La non-violence révolutionnaire   Recensions

Par Suzanne Levin, CHISCO-Paris Ouest Nanterre

A propos du livre de Micah ALPAUGH, Non-Violence and the French Revolution. Political Demonstrations in Paris, 1787-1795, New York, Cambridge University Press 2014, VIII-292 p.

Toujours présente dans l’historiographie de la Révolution française, la question de la violence révolutionnaire a pris, depuis le bicentenaire (1), un caractère quasi-obsessionnel, dont l’écho est tel que la violence est souvent tout ce que l’on retient de la Révolution dans la culture générale. S’il est sans doute peu de spécialistes de la Révolution qui avanceraient que « la violence fut le moteur de la Révolution », comme le fait Simon Schama, auteur anglais d’un ouvrage grand public paru pour le bicentenaire (2), force est de constater qu’une grande partie de l’historiographie récente rejoint ce sentiment. Sans compter les multiples études consacrées directement à la problématique de la violence dans la Révolution, pour certains, toute étude sur ce sujet se doit désormais de se focaliser sur la violence. Et cette dernière ne suffit plus : toute explication qui soit ne passerait pas par l’hypothèse de l’archaïsme – surtout du peuple – soit ne ferait pas de la violence le péché originel de « l’idéologie révolutionnaire », risque d’être suspectée d’en être partisane (3).

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Robespierre, la fabrication d’un médiocre   Recensions

Par Anne-Marie Coustou, Professeur d'histoire-géographie

A propos de l'ouvrage de Jean-Clément Martin, Robespierre, la fabrication d’un monstre, Paris, Perrin, 2016, 400 p.

Paru après Robespierre, la fabrication d’un mythe, de Marc Belissa et Yannick Bosc (2013), l’ouvrage de Jean-Clément Martin au titre quasi identique ne propose pas, à la différence du premier, de revenir sur la construction des légendes noires ou dorées de l’Incorruptible. L’introduction qui s’ouvre sur l’épisode du pseudo-masque de Robespierre que l’auteur qualifie de « quasi-comique » nous en donne l’objet. L’on pourrait penser que l’aspect « quasi-comique » résiderait dans ce montage cousu de fil blanc censé révéler « la vraie tête » du révolutionnaire. Mais pour l’auteur, c’est la réaction des défenseurs de l’Incorruptible qui est risible car «… aujourd’hui comme hier, écrit-il, on peut débattre sans crainte de la violence de Marat, de la vénalité de Danton ou de la frivolité de la reine, alors que l’épiderme national demeure sensible dès qu’on l’évoque (Robespierre) » (p. 1 et 2). Cette « crainte du débat » ne semble pas très dissuasive au vu du nombre de biographies et articles dépréciatifs parus sur l’Incorruptible. Par contre, cette « crainte » s’avère révélatrice du propos de l’auteur dont l’objectif est de libérer la parole sur Robespierre et, en quelque sorte, de déverrouiller le débat à son sujet. Le propos du livre consiste donc « à expliquer pourquoi il est le seul dans ce cas » alors qu’il est, selon Martin, un révolutionnaire parmi tant d’autres, pas même franchement remarquable par ses prises de position, ni même le plus attaché aux principes ou le plus désintéressé.

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Le féminisme et la subjectivité révolutionnaire : expérimentations et résistances   Recensions

Par Jacques Guilhaumou, UMR Triangle, ENS/Université de Lyon

A propos du livre de Eliane Viennot, Et la modernité fut masculine. La France, les femmes et le pouvoir 1789-1804, Paris, Perrin, 2016, 409 pages.

Avec l’avènement de la démocratie moderne, les citoyennes doivent expérimenter elles-mêmes les nouvelles potentialités politiques, les concrétiser dans toutes sortes de formes d’expérimentations et de résistances au pouvoir masculin, avec le soutien de quelques rares hommes dont le témoignage est d’autant plus précieux. Avancées et reculs dans le champ des rapports entre les sexes marquent alors les divers moments de la Révolution française, obligeant le chercheur soucieux de les retracer avec minutie de se situer au plus près des événements. C’est ce que nous propose Eliane Viennot, professeure de littérature française de la Renaissance à l'Université Jean Monnet (Saint-Etienne), dans la suite de sa passionnante enquête entamée au cours les années 1990 sur La France, les femmes et le pouvoir, dont l’objectif est de circonscrire la place du féminisme dans l’exception politique française. Cette somme historique sur l’histoire du féminisme vient en effet de s’enrichir d’un troisième volume relatif à la période révolutionnaire, après ceux sur L’invention de la loi salique, Ve-XVIe siècle (2006), et Les résistances de la société, XVIIe-XVIIIe (2008). Face à une Révolution française qui se veut l’ouverture des possibles par l’invention de la démocratie politique, il est légitime de s’interroger sur ce qu’il en est, au sein des événements révolutionnaires, du rééquilibrage des rapports de force entre les sexes, et de la résistance des hommes à ce mouvement d’émancipation.

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Terreur, vertu, amitié, authenticité   Recensions

Marisa Linton Choosing Terror

A propos de l'ouvrage de Marisa Linton, Choosing Terror. Virtue, Friendschip and Authenticity in the French Revolution, Oxford University Press, 2015, 323 pages.

Par Jacques Guilhaumou, UMR Triangle, ENS/Université de Lyon

« Existe-t-il, relativement à l’authenticité de l’expression des sentiments, un jugement de « spécialiste » ? (...) ‘L’authenticité d’une expression ne peut être démontrée, elle doit être ressentie’ -Soit -, mais que fait-on de l’authenticité, une fois celle-ci reconnue ? » (Ludwig Wittgenstein, Recherches philosophiques, Paris, Gallimard, 2004, p. 318)



Auteure d’un précédent ouvrage, paru, en 2001, sur The Politics of Virtue in Enlightenment France, Marisa Linton nous propose présentement un étude particulièrement originale sur les pratiques discursives des dirigeants du Club des Jacobins à Paris entre 1789 et 1794. De manière plus précise, son objet de recherche porte sur l’authenticité du langage politique propre au jacobinisme, ce que j’appelle le savoir politique jacobin, dans ses liens avec les circonstances historiques. A ce titre, Marisa Linton se considère comme une historienne du discours, tout en insistant fortement sur son orientation contextualiste. En effet, elle précise d’emblée les enjeux de son investigation dans les termes suivants : « In this book, I have investigated the relation between revolutionary ideas and the actuel practice of politics. I have tried to retain a sense of how people chose to use the language » (p. 15, c’est nous qui soulignons). Comment faut-il entendre une telle référence aux choix individuels, peu fréquente dans l’historiographie de la Révolution française ? En quoi permet-elle d’élaborer une méthode nouvelle d’approche du discours jacobin ?

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Les néoconservateurs à la française   Recensions

Christine Fauré, Les néoconservateurs à la française

Par Florence Gauthier, Université Paris-Diderot

A propos du livre de Christine Fauré, Les néoconservateurs à la française, Editions Mimésis, 2015, 145 p.

L’auteur nous propose une analyse originale et pertinente du phénomène néoconservateur qui, depuis les années 1970, sévit dans les sciences sociales et politiques en France, en déclarant la guerre à Mai 68 et à l’idée de révolution sociale. Elle en présente les sources, les dangers, les résultats.
Tocqueville apparaît au centre des références des néoconservateurs, qui l’utilisent « pour tenir une parole intelligente » contre la Révolution française, comme événement fondateur de notre histoire politique (p. 7). Ce dispositif est répété par Raymond Aron pour condamner Mai 68 et sera repris, de François Furet à Pierre Nora et Luc Ferry. Christine Fauré met en lumière la double fonction de cet usage de Tocqueville : « désigner une place sur l’échiquier politique et dire le présent » (p. 7).
Aron, interprétant Tocqueville, ne manque pas de désinvolture en le mettant en parallèle avec Marx, mais un Marx réduit… au marxisme stalinien, ou encore un fondateur de la sociologie et, surtout, un prophète « de la société inquiète et pacifique dans laquelle les Occidentaux vivent » depuis 1945 (Aron cité p. 15), soit une modernité démocratique enfin trouvée.

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La philosophie politique de Gabriel Bonnot de Mably   Recensions

Peter Friedemann, Die Politische Philosophie des Gabriel Bonnot de Mably

Par François Ternat, GRHis-Université de Rouen

A propos du livre de Peter Friedemann, Die Politische Philosophie des Gabriel Bonnot de Mably (1709-1785). Eine Studie zur Geschichte des republikanischen und des sozialen Freiheitsbegriffs, Berlin, LIT Verlag, Politische Theorie und Kultur, 350 p., 2014.

Voici un livre salutaire qui ouvre l’étude de l’histoire des idées politiques aux apports que constitue la pensée de Mably : l’esprit des Lumières s’enrichit du regard porté par un de ses représentants les plus brillants sur la « chose publique ». Cet ouvrage savant, riche et inspiré, nous invite à redécouvrir une pensée politique féconde et prolixe, susceptible de vivifier nos réflexions et de nourrir nos choix de citoyens sur le devenir de nos sociétés bien actuelles.
Certes, grand connaisseur et sans doute l'un des meilleurs spécialistes de Mably, Peter Friedemann n’en est pas à son premier essai pour sortir de l’ombre un écrivain essentiel du siècle des Lumières pourtant quelque peu oublié, du moins éclipsé par ses plus emblématiques consorts, Montesquieu, Diderot, Raynal, Rousseau…Florence Gauthier, Marc Belissa et au-delà le séminaire L'Esprit des Lumières et de la Révolution ont également beaucoup œuvré dans ce sens (1). Peter Friedemann a une longue familiarité – depuis quarante ans, le temps d’une carrière – avec ce philosophe politique, un des pères spirituels de la Révolution française, sinon son « véritable philosophe » selon le mot de Jules Isaac, comme l’avait rappelé Marc Deleplace dans une notice sur un précédent travail consacré à Mably. Après avoir en effet déjà publié, avec Hans Erich Bödecker, l’œuvre politique de Mably (Gabriel Bonnot de Mably : Politische Texte 1751-1783, Baden-Baden, Nomos, 2000 ; traduction française, Gabriel Bonnot de Mably. Textes politiques 1751-1783, Paris, L’Harmattan, 2008, dont on peut lire l'introduction sur Révolution Française.net), outils de travail très appréciés et de forte utilité, Peter Friedemann nous propose à présent, en une éclairante synthèse, le fruit de ses recherches antérieures, qui appelle à son tour et au plus tôt sa traduction en français pour les lecteurs francophones.

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Muséographie et idéologie   Recensions

La Traite négrière, la Révolution de Saint-domingue au Musée d’Aquitaine et l’exposition « Haïti » du Grand Palais

Par Jacques Schaff, professeur d'histoire-géographie

Un muséographe allemand écrivait: «Le musée doit atteindre le visiteur dans sa qualité d'élément constitutif du peuple et de citoyen de l'État, avec le constant souci d'établir une solide correspondance avec le présent».

I. Un musée au contenu bien ambigu

Voilà bien ce que tente de réaliser le Musée d’Aquitaine à Bordeaux dans ses salles consacrées à la traite négrière et à la Révolution à Saint-Domingue. Mais « atteindre le visiteur dans sa qualité d’élément constitutif du peuple et de citoyen de l’État » qu’est-ce à dire ? On le comprendra mieux à travers l’analyse de quelques « détails » révélateurs, si ce n’est d’une propagande bien comprise et assumée, du moins de ce que les muséographes « en solide correspondance avec le présent » ne sont pas à l’abri des influences idéologiques de ceux qui, en cette bonne ville de Bordeaux, les ont employés.

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Interpeller les acteurs de la Révolution française : le récit protagonistique   Recensions

Par Jacques Guilhaumou, UMR Triangle, ENS/Université de Lyon

A propos de Haim Burstin, Révolutionnaires. Pour une anthropologie politique de la Révolution française, Paris, Vendémiaire, 2013, 443 pages.

A la suite du saut qualitatif et quantitatif des recherches autour de la Révolution française, ces vingt dernières années, nous pouvons constater l’ouverture de voies nouvelles en matière de synthèse. Cette ouverture peut prendre appui sur la réflexivité des discours et des pratiques, donc se situer à relative distance des jugements historiographiques, ainsi que nous l’avons proposé de manière partielle dans notre ouvrage sur L’avènement des porte-parole de la République (1789-1792). Essais de synthèse sur les langages de la Révolution française (1998). A ce titre, nous avons mis l’accent, dans la lignée de la théorie critique (Gadamer, Habermas) et de l’ethnométhodologie (Garfinkel, Quéré), sur le fait que la connaissance de l’événement révolutionnaire s’appuie désormais en grande part sur la manière dont le langage des révolutionnaires constitue ses ressources au sein d’un contexte d’action. Nous avons été peut-être quelque peu optimiste, au regard des contraintes propres de l’historien dans son travail critique sur les archives.

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La Révolution française et ses catégories historiographiques   Recensions

par Jacques Guilhaumou, UMR Triangle, ENS/Université de Lyon

A propos de Jean-Clément Martin, Nouvelle histoire de la Révolution française, Paris, Perrin, 2012, 630 pages.

L'historien Jean-Clément Martin, ancien directeur de l'Institut d'Histoire de la Révolution Française, nous propose présentement un ouvrage tout à la fois passionnant, érudit et problématisé. Il s'agit principalement de faire un récit politique des événements, sans en revenir à l'histoire positiviste d'autrefois, ou de tomber sous la dépendance d'une histoire de la pensée politique d'aujourd'hui dont il importe cependant d'évaluer les acquis récents. Tout l'enjeu porte sur la portée opératoire ou non des catégories historiographiques déployées, depuis Jules Michelet jusqu'à Michel Vovelle, dans les Histoires de la Révolution française au regard des modalités politiques de l'entrée en lutte des révolutionnaires. Jean-Clément Martin fait alors preuve du souci constant de ne pas faire correspondre de manière univoque telle catégorie généralisante avec tel référent dans la réalité. Il considère donc le processus d'invention de la politique en révolution au titre d'une dynamique révolutionnaire de mieux en mieux connue depuis les travaux nombreux et divers de ces trente dernières années, comme en témoigne l'imposante bibliographie en fin de volume (pages 585-623). Il s'agit bien de mettre en avant le processus d'invention politique lui-même en déployant progressivement les multiples formes attestées de l'expérimentation révolutionnaire.

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Mythologies contemporaines : Révolution française et cultures populaires dans le monde aujourd’hui   Recensions

par Serge Bianchi, Université de Rennes II

Du mercredi 21 mars au vendredi 23 mars s’est tenu, entre le musée de la Révolution française de Vizille et l’Université Stendhal de Grenoble, un colloque « international et interdisciplinaire » au titre aussi ambitieux que fascinant : "Mythologies contemporaines : Révolution française et cultures populaires dans le monde aujourd’hui".
Les objectifs des organisateurs, Martial Poirson (1) et Alain Chevalier (2), relèvent d’un pari novateur et assumé qui ne va pas de soi, avant la tenue de cette manifestation. Il s’agit, selon eux, de conduire une « histoire sociale et culturelle de l’imaginaire révolutionnaire contemporain », en analysant dans les « cultures étrangères et aires géographiques les plus diverses », les « réappropriations et détournements » des mythes de la Révolution française par les « cultures populaires » et « leurs relais médiatiques de masse ».

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