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Bonnet de 
la liberté

Révolution Française

Le sens commun, un concept généralisé. Le revival de la tradition des Lumières et des Révolutions   Recensions

par Jacques Guilhaumou, UMR Triangle, ENS/Université de Lyon

Autour de l'ouvrage de Sophia Rosenfeld, Common Sense. A Political History, Harvard University Press, 2011.

La question très ancienne du sens commun est devenu un objet propre de recherche au sein des sciences humaines et sociales. Cependant il apparaît d'abord que les anthropologues et les sociologues, à l'exemple du dossier de la revue Société (N°89, 2005) sur le sens commun, évitent de reprendre la tradition des Lumières en matière de sens commun, dans la mesure où ils y voient un espace de promotion d'une logique universelle peu compatible avec le principe d'un savoir local présent dans les diverses formes du sens commun au sein de sociétés déterminées. Il s'agit alors de considérer un savoir qui conditionne l'action sociale, qui est organiquement lié à la vie, donc nous renvoie à la compréhension du sujet par lui-même. C'est bien ainsi que toute une tradition de la sociologie compréhensive, située au plus proche d'une phénoménologie de la connaissance sociale, de Dilthey à Simmel, de Weber à Schütz, et de bien d'autres auteurs importants, s'intéresse aux modes de connaissance à la fois théoriques et pratiques de l'action, en partant du principe que l'acteur se doit de comprendre son action. L'acteur en vient ainsi, au-delà du fait même de l'empathie, à construire la propre interprétation de son action au titre de l'esprit objectivé. Dans la lignée de Max Weber, il peut s'agir alors de constituer des idéaux-types, sens commun inclus, au plus près de la manière dont l'acteur comprend l'ensemble des actions pensées par lui-même.

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Résister à la duperie de soi : de Rousseau à Sieyès   Recensions

par Jacques Guilhaumou, UMR Triangle, ENS/Université de Lyon

Revue critique à propos de :
Augustin Giovannoni, Les figures de l’homme trompé, Paris, PUF, 2010 ; et sous sa direction, Figures de la duperie de soi, Paris, Kimé, 2001.
Jean-Jacques Rousseau en 78 lettres, un parcours intellectuel et humain, présentation de Raymond Trousson, Paris, Editions Sulliver, 2010.
Rousseau et les philosophes, sous la direction de Michael O’Dean, Voltaire Foundation, Oxford 2010.
Frank Salaün, Le genou de Jacques. Singularité et théorie du moi dans l’œuvre de Diderot, Paris, Hermann, 2010.
Daniel Roche, Les circulations dans l’Europe moderne (XVIIe-XVIIIe siècle), Paris, Fayard, 2010.

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La société londonienne du XVIIIe siècle dans le regard d’un couple, Elizabeth et James Cook   Recensions

Anna Enquist Le retour

par Jacques Guilhaumou, UMR « Triangle », Université de Lyon, CNRS/ENS

A propos du roman d’Anna Enquist, Le Retour, Actes Sud, 2007, 489 pages: le conjugalisme à l'épreuve de la fiction

"Tout est historiquement exact dans le nouveau roman de la Néerlandaise Anna Enquist. Et pourtant l'imaginaire domine ce livre qui prend pour point de départ la vie et les voyages de l'explorateur James Cook" (Christine Ferniot, Lire, avril 2007).
L’explorateur anglais James Cook (1728-1779), devenu célèbre pour ses tours du monde entamés à partir de 1768 est, pour les siens, un époux et un père longuement absent, voire ne donnant plus de nouvelles dès qu’il a atteint les mers au-delà du Cap. Absent donc d’abord l’été pendant douze ans, puis deux à trois ans ensuite. Conscient d’une si longue séparation, et dans le but de conserver une trace écrite des activités respectives de chacun, James dit alors à sa femme Elizabeth, « Tu peux rédiger un journal de la maison comme moi je tiens un journal de bord ». La principale narratrice fictive de ce roman, en l’occurrence Elizabeth, réagit mal en considérant qu’ « elle s’était senti humiliée ».

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Réflexion sur les formes historiques et sociodiscursives de l'engagement en Révolution   Recensions

par Jacques Guilhaumou, UMR "Triangle", ENS-Lyon/Université de Lyon

A propos de l'ouvrage de Guillaume Mazeau, Le bain de l’histoire. Charlotte Corday et l’attentat contre Marat (1793-2009), Paris, Champvallon, 2009, 427 pages.

La mort de Marat, le 13 juillet 1793, est un événement régulièrement revisité, de génération en génération, par les journalistes, par les érudits locaux et plus irrégulièrement par les historiens « universitaires ». L’originalité de la démarche de Guillaume Mazeau est de prendre parti, dès l’introduction, pour une histoire universitaire engagée à propos de l’assassinat commis par Charlotte Corday contre Marat. Il s’agit alors, entre histoire, historiographie et mémoire, d’entrer dans « une fabrique du passé » où se dévoilent des pratiques sociales enracinées dans l’événement « assassinat de Marat ». Ainsi l’attention de l’historien se porte prioritairement sur les formes de l’engagement qui se manifestent dans la multiplicité des expériences de l’événement autour de la figure de Charlotte Corday.

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Naissance (et mort ?) du capitalisme   Recensions

Par Yannick Bosc, GRHIS-Université de Rouen

Note de lecture sur Ellen Meiksins Wood, L'origine du capitalisme. Une étude approfondie, 2002, trad. François Tétreau, Montréal, Lux Editeur, 2009, 313 p.

L'origine du capitalisme d'Ellen M. Wood est à la fois une synthèse érudite de ses recherches et un ouvrage militant. En effet, si le capitalisme a une origine, comme l'indique le titre, cela signifie qu'il possède également une fin. L'enjeu est donc « de comprendre le capitalisme, pour comprendre ce qu'il faudrait faire pour l'abolir ». Au cœur de ce livre, il y a la dénonciation de la croyance, très largement partagée, en une existence quasi naturelle du capitalisme. Ce système économique , au sein duquel tous les acteurs dépendent entièrement du marché et dont l'objectif est de maximiser les profits, émerge à l'époque moderne. Cependant, on considère généralement qu'il serait l'aboutissement inéluctable de tendances qui ont toujours été présentes. L'histoire du capitalisme se réduit donc le plus souvent à l'étude de la manière dont les obstacles à son déploiement ont été levés – celui du féodalisme en particulier – , tantôt de manière progressive, tantôt grâce à la violence révolutionnaire, la fameuse « révolution bourgeoise ».

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Sur L'idée de droits naturels de Brian Tierney   Recensions

Par Florence Gauthier, ICT-Université Paris-Diderot, Paris 7

Note de lecture sur Brian Tierney, The Idea of Natural Rights. Studies on Natural Rights, Natural Law and Church Law, 1150-1625, Michigan/Cambridge UK, Eerdmans, 1997, 380 p.

« Quel beau livre ne composerait-on pas en racontant la vie et les aventures d’un mot ; sans doute, il a reçu diverses impressions des évènements auxquels il a servi ; selon les lieux, il a réveillé des idées différentes… »

Balzac, Lucien Lambert cité par B. Tierney, op. cit., n 14, p. 47.

Ayant été frappée par la présence, dans les sources de l’histoire des Révolution de France et de Saint-Domingue, d’une ‘petite phrase’, droit naturel, à laquelle j’ai consacré un premier livre (1) publié en 1992, je viens de rencontrer, avec douze ans de retard, cet ouvrage pionnier de Brian Tierney sur une question encore si mal connue : celle de l’apparition de la ‘petite phrase’ et des sources des débuts de son histoire, sur laquelle planent encore tant de préjugés et d’interprétations non étayées par la recherche historique. Voilà pourquoi il m’a semblé intéressant de faire connaître ce travail par ce compte-rendu tardif, puisque nous sommes en 2009.

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Le Dumouriez d'Arthur Chuquet   Recensions

Par Marc Belissa, CHISCO-Université Paris Ouest Nanterre - La Défense

Arthur Chuquet, Dumouriez, 1914, réédition, Clermont-Ferrand, Les Éditions Maison, 2009

Dumouriez Chuquet

Pourquoi relire le "Dumouriez" d’Arthur Chuquet aujourd’hui ? Les "Éditions Maison" proposent une réédition de ce livre à l’identique de l’édition originale. A cette occasion, il me paraît intéressant de réfléchir sur la manière dont on faisait l’histoire militaire de la Révolution française en 1914, date de la première publication du "Dumouriez" et sur la façon dont on peut utiliser cette production scientifique dans un processus de réflexion historiographique aujourd’hui. Arthur Chuquet fait partie de ces noms de "grands ancêtres" qui figurent sur toutes les bibliographies mais qu’on lit très peu. C’est pourtant un personnage très intéressant et un grand historien de la Révolution française selon les critères en vigueur à son époque.

Il est né en février 1853 à Rocroi et meurt en banlieue parisienne en 1925. Il fait partie de la génération des pionniers des études révolutionnaires, même si, comme son contemporain Alphonse Aulard né en 1849 et mort en 1928, sa formation initiale n’était pas l’histoire de la Révolution française. Fils d’un fonctionnaire des douanes, Chuquet fait ses études primaires et secondaires à Metz et obtient son baccalauréat en 1870. De 1871 à 1874, il étudie la littérature allemande et l’histoire à l’École Normale Supérieure, avant de faire un voyage d’études en Allemagne. Agrégé d’allemand en 1876, il enseigne au lycée Saint-Louis pendant dix ans, puis devient professeur de littérature allemande à l’École Normale Supérieure. Sa thèse en 1887 porte déjà sur la campagne de 1792. Il devient le directeur de la Revue critique d’histoire et de la littérature l’année suivante et titulaire de la chaire de langues et de littérature germaniques au Collège de France à partir de 1893. Enfin, il entre à l’Académie des Sciences morales et politiques en 1900 et enseigne l’allemand jusqu’en 1921 à l’École militaire de Paris. Une grande carrière d’universitaire sous la Troisième République donc.

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La Révolution impossible, et pourtant là….   Recensions

Par Françoise Brunel, EA 127 « Modernités et Révolution », Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne et Jacques Guilhaumou, UMR « Triangle », ENS-LSH/Université de Lyon

A propos de Pierre Michon, Le roi vient quand il veut. Propos sur la littérature, Paris, Albin Michel, 2007, 394 pages, et Les Onze, Paris, Verdier, 2009, 137 pages.

Un projet littéraire sur la Terreur

Dans ses Propos sur la littérature, Pierre Michon revient à plusieurs reprises sur un projet de roman qui l’occupe depuis plus d’une dizaines d’années : « J’ai plusieurs textes en train. L’un d’eux est une fiction sur la Terreur de 93 » et de préciser l’environnement adéquat à l’écriture de ces projet : « …si bien que le Marat assassiné de David est là aussi à quatre ou cinq exemplaires, partout où je peux porter les yeux » (p. 67). Il précise : « Tout de même, en ce moment, pour le livre que j’écris et qui porte sur une période bien précise du XVIIIe siècle, j’ai des mètres et des mètres de documentation, sur les costumes révolutionnaires, sur un décret, sur n’importe quoi, sur tout » (p. 108). Il s’explique ailleurs plus longuement sur l’importance de l’enjeu de ce projet littéraire : « D’abord cette grande machine à propos de 1793, du moins autour, sur laquelle je suis depuis plusieurs années, ou ce que j’essaye d’affronter, c’est le nœud des arts et de la politique, l’éclipse de Dieu, le meurtre du père et le massacre réciproque des fils, et l’impuissance des arts à rendre compte, tout le fatras. Ou encore : pourquoi la Révolution française n’a pas produit d’œuvres d’art à la hauteur de l’événement ? Mais le problème est bien vaste pour moi, et cette histoire de Terreur me terrifie, littéralement je veux dire. Pourtant je suis heureux de ce que j’en ai écrit jusque-là, et si ça se trouve, c’est fini à mon insu…» (p. 158).

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Le sans-culotte comme emblème   Recensions

Par Emilie Bremond-Poulle, ICT-Université Paris 7-Denis Diderot

A propos de l'ouvrage de Michael Sonenscher, Sans-Culotte an Eighteenth-Century Emblem in the French Revolution, Princeton, 2008.

Michael Sonenscher, enseignant chercheur au King’s College, Université de Cambridge, entreprend dans cet ouvrage l’examen de l’expression « sans-culottes » sous un angle nouveau. Il dévoile comment, avant de refléter le mouvement révolutionnaire parisien, cette expression était employée dans les salons du XVIIIe siècle. Ainsi, en introduisant son livre, il annonce « C’est un livre à propos des sans-culottes et du rôle qu’ils ont joué dans la Révolution française. C’est aussi un livre à propos de Rousseau, et non moins à propos des salons »(1). Il s’agit donc ne pas faire de confusions, Michael Sonenscher, historien spécialisé dans l’histoire économique et de la pensée politique au XVIIIe, ne cherche pas à refaire l’histoire du mouvement sans-culotte, mais à livrer une vue plus globale sur l’histoire des idées aux XVIIIe, en appuyant sa réflexion sur les usages de cette expression. Développant autour de deux de ses domaines de prédilection, l’économie et la pensée politique, son livre englobe avec adresse des sujets variés : allant de l’usage des références à la philosophie antique au cours du XVIIIe aux réflexions physiocratiques sur la propriété. Le résultat en est un ouvrage relativement long et dense, divisé en six chapitres.

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Murder in Aubagne. Lynching, Law and Justice during the French Revolution   Recensions

D. M. G. Sutherland, University of Maryland, College Park.

A propos d'un ouvrage et d'un débat

par Jacques Guilhaumou, UMR "Triangle", Université de Lyon, CNRS-ENS/LSH

Bien connu des historiens de la Révolution française, par ses nombreux livres et sa publication en 2003 d'un ouvrage collectif sur Violence et Révolution française (1), Donald Sutherland s'intéresse, dans son dernier ouvrage sur "Murder in Aubagne", aux luttes de factions, et à leur arrière-plan de pendaisons et d'assassinats commis pendant la Révolution française à Aubagne,"ville agraire" proche de Marseille d'environ 7.000 âmes, 60% de la population y vivant, d'une manière ou d'une autre, de l'agriculture. Le centre du propos de l'auteur porte donc sur le "le factionalisme" qu'il considère comme la source essentielle des événements révolutionnaires locaux, et donc leur explication la plus pausible, ce qui l'incite à étudier de manière minutieuse la part de responsabilités des autorités locales dans leur déroulement.

A ce titre, les enjeux idéologiques sont mis au second plan, ou tout du moins sont perçus seulement comme des effets - voir par exemple la qualification "contre-révolutionnaires" par les Jacobins - d'une lutte de factions, avec la volonté de la faction dominante du moment d'éliminer physiquement ses adversaires. Ainsi la lutte continuée contre "les ennemis du peuple" permet à l'une des factions en présence de l'emporter sur l'autre, au gré des retournements politiques nombreux dans le Midi de la France (la révolution, le fédéralisme, la contre-révolution).

Par ailleurs, tout en émettant un point de vue particulier sur la révolution à Marseille, longuement décrite dans sa relation à la vie politique de la commune proche d'Aubagne, cet historien américain ouvre un débat, en particulier avec les travaux d'histoire sociale et politique, sur Aubagne et sa région, d'un jeune historien français, Cyril Belmonte.

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La Révolution française et la fin des colonies   Recensions

par Florence Gauthier, ICT, Université Paris Diderot-Paris 7

A propos du du livre d'Yves Bénot, La Révolution française et la fin des colonies, Paris, La Découverte, 1988, rééd. 2004.



Le compte-rendu de ce livre a été publié dans les Annales Historiques de la Révolution Française (1988, p. 491-93). Nous le rééditons vingt ans après, car ce livre a constitué, au moment de sa parution, une véritable rupture en ouvrant un chantier novateur et, pour cette raison, nous apparaît toujours d’actualité. Yves Bénot nous a quitté le 3 janvier 2005. Nous reproduisons donc ce compte-rendu tel qu’il a été rédigé initialement, en corrigeant quelques coquilles, et en rajoutant une Note additive vingt ans après.

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Thomas Paine contre la domination des experts   Recensions

Par Yannick Bosc, GRHIS-Université de Rouen, IUFM de Haute-Normandie

A propos de l'ouvrage d'Edward Larkin, Thomas Paine and the literature of Revolution, Cambridge, Cambridge University Press, 2005, 205 p.

L’originalité de cette étude est d’appréhender Thomas Paine du point de vue de l’histoire littéraire des États-Unis et de retrouver par ce biais les fondements de la pensée et de l’action politique du révolutionnaire. On y lit un Paine subversif, populaire et savant, plus dense que le polémiste auquel on le réduit souvent dans l’histoire américaine, et qui bouscule également l’icône consensuelle de l’historiographie de la Révolution française.

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Toussaint Louverture : un révolutionnaire noir d'Ancien Régime ?   Recensions

par Florence Gauthier, ICT, Université Paris Diderot-Paris 7

A propos du livre de Pierre Pluchon, Toussaint Louverture. Un révolutionnaire noir d'Ancien Régime, Paris, Fayard, 1989, 654 pages.

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La « révolution moderne » de l’artifice politique (16ème-19ème).   Recensions

Par Jacques Guilhaumou, UMR « Triangle », CNRS/ENS-LSH Lyon.

Marcel Gauchet propose, en quatre volumes, une réflexion originale sur L’avènement de la démocratie (1), dans la continuité de son précédent ouvrage sur Le Désenchantement du monde (2) où il s’agissait de mettre en évidence l’emprise du religieux dans l’histoire des sociétés humaines, et la lente désintrication du religieux et du politique au fil des siècles. Le premier volume est titré La révolution moderne : il précède un second volume sur La crise du libéralisme. Il apparaît alors comme une sorte de prologue relatif aux multiples révolutions de la modernité, entre 1492 et 1880. Marcel Gauchet les regroupe sous la désignation de « révolution moderne », au titre de la dynamique politique qui impose progressivement l’autonomie comme la forme politique dominante d’organisation, c'est-à-dire « la révolution de l’autonomie ».

Ainsi se précise, par étapes, « une configuration inédite de l’être-ensemble », que l’auteur rapporte à « cette part structurelle et inconsciente du fonctionnement de la démocratie des modernes », où la religion n’est plus le contenu dominant, mais dont la forme persiste, quitte à resurgir de diverses manières, à différentes époques. Il s’agit donc de « dégager les composantes spécifiques du monde désenchanté qui émergent au fils de ce parcours, dans l’ordre politique, dans l’ordre juridique et dans l’ordre historique » (p. 10).

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La Révolution française et l’intelligence politique de l’héritage historique : les objets patrimoniaux.   Recensions

par Jacques Guilhaumou, UMR « Triangle », CNRS/ENS/LSH

Au cours des années 1990, deux périodes ont été privilégiées dans le renouvellement de nos connaissances sur l’histoire du patrimoine, la Révolution française et le premier XIXème siècle. L’enjeu historiographique, ainsi que le soulignent Philippe Poirier et Louis Vadelorgue (2003) dans un ouvrage collectif, consiste alors à comprendre comment conscience et politique du patrimoine émergent au cours des années 1780-1810 dans la lignée de la formation de l’espace public. Cependant, au-delà de cet apport collectif et de l’ouvrage bien informé d’Edouard Pommier (1991), la perspective la plus novatrice est le fait de Dominique Poulot (1996, 1997, 2006) qui nous propose une vue d’ensemble de la manière dont la Révolution française met en place « l’intelligence de l’héritage historique » par une exploration minutieuse des objets patrimoniaux, de leur « futur passé » (Reinhart Koselleck), au cours d’un moment particulièrement dense d’intégration du passé national.

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