Une citoyenneté sans identité nationale : raviver le désir de la marche pour l’égalité Actuel
Par Saïd Bouamama, acteur de la Marche pour l’égalité de 1983, et Sophie Wahnich, historienne (Laios-CNRS)
Dialogue publié dans la revue Vacarme n°46
Paris, 21 Novembre 2008
Sophie : En 1986, je travaille sur l’étranger dans la Révolution française, j’espère explicitement trouver dans ce moment historique un modèle d’hospitalité qui vienne contrecarrer la politique de Pasqua et donner des outils pour imaginer une autre république, fidèle à ses principes : une humanité une, une égalité entre les hommes, égalité faite de relations libres et réciproques entre les citoyens et entre les peuples. Au XVIII e siècle, la notion de nationalité n’est pas encore constituée, encore moins la notion d’Etat-nation. Le roi donne cependant des lettres de « naturalité » aux étrangers qui en font la demande et la souveraineté du peuple se dote d’une assemblée nationale constituante. Un écheveau d’ambiguïtés ? Des difficultés pour le moins à venir. Cette capacité à découpler ou à rendre moins exclusif le lien entre citoyenneté et « naturalité française » selon les termes de l’époque, a de fait bien existé pendant la Révolution française. Autour du « nom français », ce qui se jouait n’était pas une identité nationale mais une manière d’être au monde et de vouloir y jouer un rôle.