Qu’est-ce que « la propriété » pour les contemporains de la décennie révolutionnaire ? Se limite-t-elle à la propriété « bourgeoise » des biens matériels ? L’américain James Madison (1751-1836), alors membre de la Chambre des Représentants des Etats-Unis, répond dans un article non signé (la chose est alors courante) publié dans la National Gazette de Philip Freneau. Ce journal paraissant à Philadelphie est devenu au moment de la publication de l’article une sorte d’organe de ce que Madison appelle lui-même le « parti républicain » opposé à la politique du Secrétaire d’Etat au Trésor, Alexander Hamilton. Pour Madison, Jefferson (alors Secrétaire d’Etat dans le gouvernement de Washington), Freneau et tous ceux qui commencent à s’auto-désigner comme des « républicains » par opposition aux « monocrates » (qualificatif utilisé par les « républicains » pour désigner politiquement ceux que l’on appellera par la suite les « fédéralistes »), la politique menée par Hamilton, en prétendant défendre « la propriété » et la prospérité des Etats-Unis, vise à construire un système fisco-financier au bénéfice de spéculateurs sur la dette des Etats-Unis et plus généralement du « few » (c’est-à-dire du « petit nombre ») au détriment du « many » (c’est-à-dire du « plus grand nombre »). Madison, Jefferson et les « républicains » comme George Logan ou John Taylor élaborent une « politique économique républicaine » qu’ils opposent au système hamiltonien. La publication de cet article participe de cette réflexion et de cette élaboration en cours en 1792.

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