Laconisme et abondance : deux modèles pour le discours révolutionnaire Mots
par Agnès Steuckardt, Laboratoire "Parole et langage", Université de Provence (Aix-Marseille I).
La présente contribution ouvre le débat sur les modèles qui présidaient, pendant la Révolution française, à l’élaboration du discours. Alors que, comme l’ont souligné à juste titre les synthèses les plus récentes, les révolutionnaires ont beaucoup décrié les séductions rhétoriques et se sont volontiers réclamés du laconisme, ils n’ont pas, à l’évidence, renoncé à l’abondance de l’éloquence. Cette pratique, apparemment contradictoire avec leur modèle théorique, n’est pas sans avoir fait elle-même l’objet d’un discours métadiscursif avant et pendant la Révolution. Les deux modèles, laconisme et abondance, semblent en fait coexister ; les modalités de leur articulation nous sont suggérées par certains passages de ces textes métadiscursifs, qui, en même temps qu’ils prônent un certain style d’expression, indiquent à quelle situation de parole il convient : si le laconisme caractérise la parole de celui qui détient l’autorité, les développements abondants semblent demeurer nécessaires à celui qui cherche à la conquérir.