Les enjeux d’une traduction Historiographie
par Julien Louvrier, GRHIS-Université de Rouen
A propos de l'ouvrage d' Eric J. Hobsbawm, Aux armes, historiens. Deux siècles d’histoire de la Révolution française, Paris, La Découverte, 2007, 154p. Avec une postface inédite de l’auteur. Traduit de l’anglais par Julien Louvrier. En librairie le 11 octobre 2007.
Au lendemain du bicentenaire de 89, l’historien britannique Eric J. Hobsbawm publiait aux éditions Verso sous le titre évocateur Echoes of the Marseillaise. Two Centuries Look Back on the French Revolution (1) , le contenu étoffé et remanié d’une série de conférences prononcées au cours de l’année 1989 à l’Université Rutgers aux États-Unis. En cette année commémorative largement dominée par la vision furetienne de l’histoire de la Révolution, Hobsbawm entendait convaincre son auditoire et ses futurs lecteurs de ne pas s’en laisser compter par « l’air du temps » : très sévère à l’égard du « révisionnisme historique », il proposait de porter un regard rétrospectif sur deux siècles d’historiographie révolutionnaire, avec pour objectif de mettre en lumière les enjeux politiques de l’entreprise de relecture de l’histoire de la Révolution amorcée au milieu des années 1950 par Alfred Cobban contre « l’interprétation sociale » et poursuivie jusque dans les années 1980 par des historiens s’étant entre-temps autoproclamés « critiques ».
Eu égard à la façon dont la France venait de célébrer le deux centième anniversaire de sa Révolution, ce genre de contre-expertise venait à point. C’est d’ailleurs ce que comprirent très vite les éditeurs italiens (2) et espagnols (3) qui firent traduire le livre dès sa sortie. Quoi de plus normal en effet que de faire paraître les appréciations d’un grand historien marxiste de renommée internationale sur l’historiographie d’une période tellement importante pour l’histoire du monde contemporain ?